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Au-delà de Marwan Barghouti (4) !
(info # 012610/2)
Par Salomon Pardess © Metula News Agency
Comme
je l’indiquais dans ma dépêche précédente, la question du visage de
l’interlocuteur de la paix et du monothéisme se pose de manière drastique, au
Proche-orient, depuis que Rabin, pour des raisons que je ne peux analyser dans
cet article, avait décidé, malgré lui, comme le rappelle Uri Dan dans son livre
Mossad, de « faire » Arafat, c’est-à-dire d’en faire cet interlocuteur
pour la paix.
Il a
donc suffi que Rabin disparaisse sous les coups du terroriste juif
Ygal Amir, pour que ce « visage » (Arafat) s’effrite
tout seul. Rabin eût-il vécu, il n’est absolument pas sûr qu’Arafat eût réussi à
maintenir vivant ce visage, mais ce qui est certain, c’est que Rabin mort,
Arafat a perdu le miroir en lequel il voyait, tous les jours, se dresser, tant
bien que mal, l’image du chef d’Etat respectable et respecté de tous qu’il
voulut être un moment.
Aujourd’hui, la question du visage palestinien de la paix se pose à nouveau,
mais plus dans les mêmes termes. Arafat étant pour l’instant (et sans doute à
jamais) hors-jeu, et la crise de la gauche israélienne révélant que la
constitution d’un visage palestinien pour la paix ne pourrait se faire à
l’avenir en empruntant les voies passées, une autre voie doit s’ouvrir à la
droite actuellement au pouvoir et bien malin celui qui est, aujourd’hui, capable
de dire par quelle porte elle va apparaître.
Pourtant, certains, qui ne paraissent pas avoir compris le jeu dissymétrique en
miroir des interlocuteurs de paix dans le conflit israélo-palestinien
s’évertuent à croire qu’il n’est pas nécessaire de tirer les leçons de l’échec
passé.
Bien
plus, ils tentent de nous faire croire que ce n’est pas seulement en acceptant
l’inacceptable que les Israéliens se donneront ce visage de paix palestinien
dont ils ont besoin (seuls quelques fanatiques qui ont décidé de sortir de
l’Histoire n’en ont pas besoin), mais en admettant que le pire qu’on leur a fait
était le bien.
C’est
le cas de Leibovitz, avocat juif de
Barghouti, petit-fils de
Yeshayahou Leibovitz, qui, accroché à son
identification à l’agresseur au lieu de l’être à son grand-père, voit en
Barghouti un nouveau Moïse, effaçant par la même,
l’affirmation de vie que le grand Leibovitz n’aurait
pas manqué d’opposer aux attentats - suicides.
Car,
si Barghouti est certes présumé innocent, il est
tout de même accusé d’être responsable et coupable de crimes commis par les
Brigades Al-Aqsa, sur lesquels il aura à s’expliquer
clairement lors de son procès.
L’identifier à Moïse est donc non seulement une ineptie, compte tenu de l’œuvre
du Législateur biblique, mais une médiocre opération politicienne qui consiste à
miser sur l’amnistie d’une personne, pour le cas où celle-ci serait condamnée.
Mais,
c’est aussi le cas du journaliste Gilles Paris qui considère
Barghouti comme un « Cas ».
En effet, Le Monde (22 octobre 2000) n’a pas attendu la quatrième journée
d’audience de son procès, pour faire le portrait de celui qui est accusé de
meurtres et autres assassinats – suicides de civils israéliens par la justice
israélienne.
En entourant le mot « cas » de guillemets, et en nous exposant « Le « Cas »
Barghouti », Paris veut nous faire croire que
l’accusé n’est pas un cas parmi d’autres, mais que c’est bien le cas des cas, le
« Cas ».
Bien. Mais le cas des cas de quoi ? Paris est clair : du Palestinien que le
gouvernement de l’Etat d’Israël verrait bien comme un éventuel futur
« interlocuteur de choix ».
Et de nous dire ce qu’il pense de l’idée qui ferait son chemin dans les médias,
et, selon les médias, dans les sphères du pouvoir de Jérusalem, à savoir que
Barghouti pourrait être le successeur de Yasser
Arafat.
Selon quels critères ? Jugez-en vous-mêmes.
Premier critère : Barghouti est accusé d’être
responsable de crimes contre l’humanité, mais il n’est pas question qu’il
discute des charges présentées contre lui.
C’est donc un « bon » candidat. Car, si le gouvernement d’Israël accuse Arafat
de ne rien faire pour interrompre la chaîne de ces crimes, voire de les
financer, il accuse Barghouti d’être à la tête d’une
organisation qui en a commis un grand nombre. On le voit, plus le crime est
énorme, plus il y a une chance qu’Israël reconnaisse dans son adversaire
irréductible l’interlocuteur de choix. C’est une nouvelle version de la « paix
des braves », sauf que si cette « paix » est entérinée, le crime contre
l’humanité devient un épiphénomène de la guerre.
Le problème est que jamais Paris ne dira que Barghouti
est un terroriste. Ce serait seulement un « activiste précoce », un partisan de
« l’usage de la violence comme arme politique », ou bien quelqu’un qui est
accusé par l’armée israélienne (pas par la justice, bien sûr), « de diriger, en
marge de ses activités politiques, un groupuscule militaire clandestin du Fatah,
les Brigades des martyrs d’Al-Aqsa qui s’est fait
connaître par des opérations perpétrées dans les territoires palestiniens contre
des militaires et des colons ».
Eloge, donc, de ces Brigades qui n’auraient jamais commis d’actes terroristes ni
dans les territoires palestiniens ni en Israël, mais aurait causé la mort
« d’une trentaine de personnes », par un journaliste qui serait mieux informé
que l’armée et la justice israéliennes. A croire que Paris souhaiterait être
entendu à la quatrième audience.
De grâce, Monsieur Paris, ayez au moins la pudeur d’attendre que le procès vous
donne raison avant de nous asséner votre credo en Marwan
Barghouti !
Deuxième critère : il connaît parfaitement la société israélienne.
Il faut lire ce que ça donne dans le texte : « De longue date, ce dernier
revendique certes l’usage de la violence comme arme politique, ce qui en fait
une cible potentielle, mais on lui reconnaît aussi une parfaite connaissance de
la société israélienne et on mesure le talent prometteur d’un jeune responsable
qui peut se révéler à l’avenir un interlocuteur de choix pour des temps
apaisés ». On s’attendrait à ce que l’on nous explique que, parce qu’il connaît
bien la société israélienne, Barghouti qui ne
cherche pas apaiser les temps, utilise la violence pour la détruire, eh bien
non, c’est pour être un interlocuteur de choix.
On saisit là l’empreinte du militantisme politique à l’occidental que Paris
laisse passer en contrebande, empreinte dont, il faut le dire, les gauchistes
européens (notamment français) qui passent pour des intellectuels de la
révolution permanente, n’ont cessé, depuis la fondation de l’OLP (1964), de
projeter sur les mouvements d’émancipation nationale palestinienne, sans
distinction. Au passage, je voudrais dire que si l’on comprend que Alain
Krivine veuille être entendu lors du procès
Barghouti, on ne comprendrait pas que lui et ses
alliés n’aient un jour à s’expliquer clairement, en France, sous la forme d’un
débat public, par exemple, sur leur « profonde compréhension » des comportements
terroristes de ceux qui organisent ou pratiquent les attentats-suicides comme
arme ultime (certains d’entre eux ne se sont désolidarisés de ces actes ignobles
que tout récemment).
Troisième critère : il parle hébreu.
Pour bien s’entendre, il faut parler la même langue. Soit ! Arafat ne parle pas
l’hébreu. Barghouti si. Il s’est même publiquement
exprimé en hébreu dans le passé à la télévision israélienne. Mais, si les
intentions pour lesquelles Arafat n’a jamais voulu apprendre l’hébreu sont
évidentes et correspondent à sa décision, non encore effacée de la Charte de
l’OLP d’ailleurs, que la lutte de libération nationale doive passer par la
destruction de l’Etat d’Israël comme Etat juif (c’est-à-dire comme état), celles
de Barghouti de le parler ne le sont pas moins.
C’est, en effet, dans la langue de l’Etat juif qu’il veut dire sa décision de
détruire l’Etat juif en tant que Juif, c’est-à-dire, ici, en tant qu’Etat.
Là aussi, un argument qui devrait mettre en garde les Israéliens, dans la mesure
où on ne détruit bien son ennemi que pour autant qu’on parle sa langue, est
retourné par un journaliste (et peut-être par certains Israéliens, d’ailleurs),
en argument qui devrait leur ôter tout réflexe d’accroître leur vigilance.
Pour conclure, il serait temps que l’on dise qu’au-delà de
Barghouti, il y a d’autres Palestiniens. Car, qu’on ne me dise pas qu’à
ce compte-là, Israël n’aura plus jamais d’interlocuteur de paix. D’autres
Palestiniens connaissent l’intime fonctionnement d’Israël (ce que permet la
connaissance de la langue et de la société hébraïques) et veulent imposer à
l’Etat d’Israël de reconnaître l’existence d’un Etat palestinien, mais en
tournant le dos à la violence en général et aux attentats-suicides, en
particulier.
Bien entendu, pour eux, le chemin sera long, parce que chez les Israéliens comme
chez les Palestiniens, ils existent des gens qui veulent tuer leur expression
dans l’œuf et parce qu’ils se heurtent tous les jours à la délation, voire à la
destruction par les bandes armées, au prétexte qu’ils seraient des
« collaborateurs »…. mais aussi parce que les médias occidentaux ont visiblement
fait le choix de ne pas en parler.
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